Quel accès au dossier médical ?
Droit de rectification, délai de transmission, information du patient sur ses droits, patients mineurs, réquisitions et perquisitions judiciaires… Tout ce qu’il faut savoir sur l’accès au dossier médical.
La loi Kouchner du 4 mars 2002 a posé le principe général de l’accès du patient aux informations concernant sa santé. Tout patient qui en fait la demande à son praticien peut accéder directement aux informations sur sa santé. Les chirurgiens-dentistes sont ainsi tenus de remplir un dossier pour tous leurs patients, et de les archiver. Le Code de la santé publique, dans son article L. 1111-7, est très clair sur ce droit : « Toute personne a accès à l’ensemble des informations concernant sa santé détenues, à quelque titre que ce soit, par des professionnels et établissements de santé, qui sont formalisées ou ont fait l’objet d’échanges écrits entre professionnels de santé. »
Des informations formalisées. Le même article du CSP précise que ces informations concernant la santé du patient sont « notamment des résultats d’examen, comptes rendus de consultation, d’intervention, d’exploration ou d’hospitalisation, des protocoles et prescriptions thérapeutiques mis en œuvre, feuilles de surveillance, correspondances entre professionnels de santé […] ». Le droit d’accès prévu par le texte ne s’exerce donc que sur des données, nous citons le texte, « formalisées ».
Secret professionnel. Au rang des grands principes que le chirurgien-dentiste est tenu d’appliquer scrupuleusement, l’un d’entre eux, fondamental, touche au secret professionnel (article L. 1110-4 du CSP, article 226-13 du Code pénal) : les éléments du dossier médical ne peuvent être remis qu’au patient et en aucun cas à un tiers, sauf exceptions sur lesquelles nous reviendrons.
Droit de rectification. Le droit d’accès au dossier médical est assorti d’autres droits. En effet, les patients peuvent rectifier les données figurant dans leur dossier en cas d’erreur. Ils peuvent aussi s’opposer à leur traitement pour des raisons tenant à leur situation particulière. Enfin, ils peuvent effacer les données dans certains cas, lorsque, par exemple, le dossier a été conservé trop longtemps ou encore si les données sont inadéquates.
Accès sous huit jours. S’agissant d’une demande d’accès au dossier, elle doit être satisfaite dans les huit jours au plus tard et au plus tôt après un délai de réflexion de 48 heures. Une exception est posée cependant lorsque les informations contenues dans le dossier datent de plus de cinq ans. Dans ce cas, le praticien dispose de deux mois pour satisfaire à la demande du patient. S’agissant d’autres demandes, par exemple la rectification de données figurant sur le dossier, elles doivent être satisfaites par le praticien dans des délais « raisonnables ». Transmission du dossier. En pratique, comment ce droit d’accès s’exerce-il ?
Le patient demandeur peut obtenir communication des informations le concernant via une consultation sur place. S’il le souhaite, il peut alors se voir remettre les copies des documents. La consultation des documents sur place est gratuite. Le patient peut aussi demander l’envoi de copies des documents. Les frais de délivrance des copies seront à sa charge, l’article L. 1111-7 du CSP précisant à cet égard : « Lorsque le demandeur souhaite la délivrance de copies, quel qu’en soit le support, les frais laissés à sa charge ne peuvent excéder le coût de la reproduction et, le cas échéant, de l’envoi des documents. »
Quel support ? S’agissant du support (papier ou numérique), les copies sont établies sur un support analogue à celui utilisé par le professionnel de santé, l’établissement de santé ou l’hébergeur, ou sur papier, au choix du demandeur et dans la limite des possibilités techniques du professionnel ou de l’organisme concerné (article R. 1111-2 du CSP).
Documents originaux. Quid des documents originaux du dossier médical ? Le praticien ne doit jamais s’en démunir. En cas de litige en effet, il est tenu de pouvoir produire le dossier médical du patient.
Durée de conservation. Rappelons en premier lieu que la responsabilité professionnelle du praticien peut être mise en jeu dans un délai de dix ans à compter de la consolidation du dommage. C’est la raison pour laquelle le Conseil national, en l’absence de dispositions spécifiques portant sur la durée de conservation des dossiers pour les professionnels libéraux, conseille de manière constante aux praticiens une durée de conservation de 20 ans à compter de la date de la dernière consultation du patient.
Pour être complet, précisons qu’il existe aussi une disposition protectrice pour les patients mineurs qui, une fois adultes, ont la possibilité de présenter une demande d’accès à leur dossier dix ans après la date de leur majorité.
Obligation d’information des patients. Par voie d’affichage dans la salle d’attente (un modèle d’affiche est disponible ici) ou via la mise à disposition d’un document ad hoc (dépliant, etc.), le praticien a l’obligation d’informer les patients de l’existence des dossiers médicaux et des droits des patients y afférents. L’information doit comporter impérativement le nom et les coordonnées du praticien, les finalités et la base juridique du traitement des données personnelles, y compris ses finalités ultérieures, les destinataires des données, la durée de leur conservation ainsi que les droits de la personne (accès, rectification, effacement à certaines conditions, limitation, opposition, introduction d’une réclamation auprès de la Cnil), le caractère obligatoire des données fournies et les conséquences éventuelles d’un défaut de réponse à une demande d’accès d’un patient à son dossier médical.
Le cas des patients mineurs. Dans le cas d’une personne mineure, le droit d’accès au dossier médical est en principe exercé par le ou les titulaires de l’autorité parentale. À la demande du mineur, cet accès a lieu par l’intermédiaire d’un médecin.
Le cas des patients décédés. Le secret médical ne fait pas obstacle à ce que les informations concernant une personne décédée soient délivrées à ses ayants droit, son concubin ou son partenaire lié par un pacte civil de solidarité, dans la mesure où elles leur sont nécessaires pour leur permettre de connaître les causes du décès, de défendre la mémoire du défunt ou de faire valoir leurs droits, sauf volonté contraire exprimée par la personne avant son décès.
En cas de décès d’une personne mineure, les titulaires de l’autorité parentale conservent leur droit d’accès à la totalité des informations médicales la concernant.
Perquisitions judiciaires. Les perquisitions dans le cabinet d’un chirurgien-dentiste sont effectuées par un magistrat et en présence d’un membre du conseil départemental de l’Ordre dans lequel le praticien est inscrit.
Réquisitions judiciaires. La loi autorise le procureur de la République ou l’officier de police judiciaire ou, sous le contrôle de ce dernier, l’agent de police judiciaire à requérir, par tout moyen, toute personne susceptible de détenir des informations intéressant une enquête, de lui remettre ces informations, notamment sous forme numérique, sans qu’en principe puisse lui être opposée, sans motif légitime, l’obligation au secret professionnel.
À noter : le Code pénal prévoit que lorsque la réquisition vise un médecin, la remise des informations ne peut intervenir qu’avec l’accord de celui-ci et, le cas échéant, son refus de déférer à la réquisition n’est pas pénalement répréhensible. Si les chirurgiens-dentistes ne sont pas expressément concernés par cette exception, ils doivent veiller à ne remettre que les seuls éléments visés par la réquisition.
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